« AVOIR un problème » ou « FAIRE un problème » ?

Ces deux façons d’aborder les problèmes en mathématiques représentent l’écart entre les SAÉ et les SÉ. Pourquoi?

Considérez le fait d’ « AVOIR un problème ». Plongez-vous dans une telle situation. Où êtes-vous? Que faites-vous? Lorsque j’ai un problème, je fais face à un ou plusieurs obstacles réels. Pour les surmonter, j’analyse la situation, je détermine un certain nombre de gestes à poser. Dans certains cas, je m’informe sur le web, je consulte des amis ou encore un spécialiste. Je ne suis pas démuni, j’use de plusieurs stratégies. Cela peut donner un résultat positif ou non.

Considérez maintenant que vous « FAITES un problème ». Où êtes-vous? Que faites-vous? Lorsque je pense à « FAIRE un problème », je rajoute invariablement un complément. Je FAIS des problèmes de mathématiques, de sciences, etc. Je suis dans une classe, face à une tâche scolaire. En général, je suis seul et on m’évalue. Si, par hasard, on ne m’évalue pas et qu’en plus je peux le FAIRE en équipe, ma motivation diminue et je sais que je peux m’amuser sans conséquence…à moins d’être un élève modèle. Lorsque je FAIS un problème, je sais par expérience que je dois me servir de ce qu’on vient de m’enseigner : une stratégie, une procédure, une définition, etc.

« AVOIR un problème » est ce que l’on voudrait retrouver lors des SAÉ. On voudrait voir l’élève confronté à des obstacles qu’on lui présente comme réels. On ne lui dit pas : Tiens! Aujourd’hui, tu vas faire une SAÉ. On lui présente plutôt une situation comme un défi à relever. Dans certains cas, le défi est ludique, dans d’autres, il est réel. On veut que le défi soit engageant. Il y a un contrat implicite derrière la tâche : « Je te mets au défi, veux-tu le relever? » La contextualisation du problème devient un enjeu majeur. Lors de la SAÉ, je veux voir l’élève mobiliser des ressources. J’observe s’il se dégonfle au premier obstacle, je le soutiens, l’encourage. Je regarde s’il peut communiquer avec les autres ses idées, ses besoins. Peut-il se servir de ce que les autres font? Est-il capable d’organiser un plan de match? A-t-il le réflexe de lire dans les ouvrages de référence? D’aller sur le web? Peut-il demander, ultimement, une aide précise à l’enseignant? Le défi pour l’enseignant devient alors d’observer sur le tas les actions de l’élève ou de le soutenir sans pour autant faire la tâche pour lui. L’enseignant devient un médiateur ouvert aux cheminements des élèves. Dans ce contexte, les termes « stratégies », « processus » et « capacité de transfert » prennent tout leur sens.

« FAIRE des problèmes » est ce que l’on propose aux élèves lorsqu’on dit : « Bon! Aujourd’hui vous allez faire une SAÉ. » Vous aurez beau leur dire que c’est une situation d’apprentissage et d’évaluation, mais, comme la plupart d’entre nous, ils n’entendront que le mot « évaluation ». Ils ne savent pas qu’ici ce mot a le sens d’une rétroaction au service de l’apprentissage. Comment peuvent-ils le savoir puisqu’à chaque fois qu’ils ont fait des SAÉ ils ont entendu: « Je ne peux pas le faire pour toi! Chut! On travaille en silence! Je vous ai déjà montré comment faire! Vous n’avez pas écouté! »,  etc. Les élèves savent bien qu’ils FONT un problème comme dans un examen. Ce « FAIRE des problèmes » est la SÉ. Dans ce cas, porter un jugement sur le travail de l’élève devient facile. On connaît très bien cette façon de faire. On regarde à la fin la copie de l’élève puis, à l’aide d’une grille de correction, on évalue ce qu’on voit sur le papier. On peut voir comment la SAÉ finit par être une SÉ, perdant ainsi sa fonction réelle.

Si les élèves ne sont confrontés qu’à « FAIRE des problèmes » et jamais à « AVOIR un problème », le développement de stratégies ou de processus personnels chez ceux-ci devient artificiel. Nous mêmes y croyons peu. Bien sûr! Nous faisons ce qu’il faut, nous enseignons, modelons des stratégies. Nous le faisons en fait parce qu’elles sont dans notre planif. Mais répondent-elles à un réel besoin? Pensons, par exemple, à l’utilisation stratégique de matériel pour soutenir la réflexion. Qui n’a pas encouragé les élèves à se servir de matériels en vain? Pourquoi le feraient-ils? En ont-ils un jour, face à un problème, reconnu le réel intérêt? Et les processus personnels? Ont-ils déjà vécu un problème lors duquel ils ont eu le temps nécessaire, à la suite d’essais et d’erreurs, de proposer une démarche originale? Ont-ils toujours été guidés (trop?)? Ou même, ces processus personnels ont-ils été enseignés??????

Voilà, comme enseignant, notre problème! Redonner à la SAÉ toute sa place, soit celle qui permettra à l’élève d’être réellement stratégique et au coeur de ses apprentissages. La tâche est difficile, inhabituelle, différente de ce qu’on a connu comme apprenant. Oui! Bien sûr! Cela est notre problème! Notre défi! À notre tour maintenant d’être stratégique.

Afin de voir l’utilisation des problèmes comme de réelles occasions d’apprentissage, je vous invite à consulter l’excellent document du site ontarien l’Atelier à l’adresse suivante : La résolution de problèmes (pages 1 à 75).

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